Lors de mes voyages, au fil des rencontres sur les routes, l’on m’a souvent demandé de me présenter : « Comment t’appelles-tu ? D’où viens-tu ? Quel est ton métier ? Quelle est ta religion ?… ». Autant de questions pour cerner ma personne. Mais au fond, quelles sont les bonnes questions pour se présenter ? Sur quels critères s’appuyer ?
Répondre à cette question, c’est se mettre en quête de soi et de critères pour se définir : activité professionnelle, vie privée, éducation, nationalité, passions, croyances, valeurs… Tous ces rôles constituent-ils autant de portes d’entrée pour percer les fondements de notre individualité ? Autant de masques que nous portons à tour de rôle ?… Et si ce n’est par l’opposition, quelles alternatives existe-t-il pour se définir ?
Avant d’entrer dans le vif du sujet, faisons une transgression : qu’est-ce que l’art ?
Comment définir l’art ?
Comment décide-t-on d’attribuer la prestigieuse étiquette « d’œuvre d’art » à un objet ? La question semble incongrue, tant il est évident qu’une toile de maitre ou qu’une sculpture de l’antiquité semble être la définition même de l’art.
Mais il n’en est pas toujours ainsi.
Pensez à tous ces artistes impressionnistes, dadaïstes, nihilistes… venus bousculer nos habitudes : est-ce qu’une toile blanche est une œuvre d’art simplement parce qu’elle est signée du nom d’un artiste reconnu ? La reconnait-on à ses qualités plastiques ? à son prix élevé ? Ou encore au temps passé à sa création ?
La toile peinte par un artiste amateur depuis la fenêtre de son grenier pendant deux ans a-t-elle une valeur différente d’une aquarelle créée par Kandinsky en trente secondes ? Et que penser d’un urinoir signé d’un nom de maitre ?!…
Nous le voyons, le choix du ou des critères pour définir l’art (l’auteur et sa renommée, la beauté, le prix…), n’est pas aussi aisé que l’on pourrait le penser de prime abord. Le contexte vient ici prendre une place de choix : l’art est convention sociale et rupture de ces conventions. L’art est aussi expression et par-là, profondément rattaché à l’aspect social, par sa volonté de communication. L’art ne serait-il pas, plus que le rire, le propre de l’homme ?
Comment se définir ?
Derrière cette grande question philosophique « Qui suis-je ? Où vais-je ?… », se cache une des réflexions les plus profondes de l’être humain : la définition de son être.
L’homme aime définir son environnement et c’est pour cela, sans doute, qu’il est passé des grognements aux mots : parce que, franchement, tout désigner par « RRRrrrr!!! », cela ne facilite pas la conversation. Et tant qu’à tout définir, il s’est donné un nom : « Homme ». Mais s’appeler tous « Homme », c’est revenir à l’âge de « Pierre », pas des plus pratique également ! Du coup, les prénoms sont nés, et avec eux, la notion de singularité et d’identité propre. L’on peut différencier Pierre de Paul et Jacques par leur prénom, mais pas uniquement…
Derrière cette petite fable fictive se cache le souci de l’homme de donner du sens à son environnement… et à lui-même.
L’homme peut se définir comme espèce faisant partie d’une biodiversité plus large, dont il aime se penser à la tête comme « espèce la plus intelligente ». Mais cela ne lui suffit pas : il doit se définir et se classer au sein même de cette grande espèce qu’est l’Homme, car son individualité a autant d’importance, si pas plus, que la collectivité.
C’est alors que commence le grand et perpétuel travail de l’Homme, qui, pour se définir, va chercher à ranger, ordonner et classer, les autres et lui-même. À travers cette réflexion et introspection, c’est au final toute l’espèce humaine qu’il étudie.
J’ai moi-même dû répondre à ce difficile exercice de présentation pour ce blog : la page Qui suis-je ? a surement été l’une des plus difficiles à écrire !
Quels sont les bons critères pour se définir?
Plusieurs angles d’étude de l’Homme existent :
- Les anthropologues étudient l’Homme selon une approche culturelle, la société à laquelle il appartient…
- Les sociologues veulent connaitre plus en détail votre positionnement dans cette société : faites-vous partie de la bourgeoisie ou de la classe ouvrière ?
- Les psychiatres cherchent à connaitre vos peurs les plus enfouies et vos travers pour vous donner une étiquette : névrosé, maniacodépressif ou psychotique ?
- Les biologistes vous classent dans votre règne animal, et vous étudient avec le même intérêt qu’un être unicellulaire.
- …
Chacune de ces disciplines aura donc sa vision particulière, conditionnée à approcher l’être humain selon un angle unique d’approche.
La question des critères pour se définir fait donc face à une multitude de courants de pensée. Une approche globale serait intéressante, mais reste fort théorique. Vous vous voyez répondre en soirée, quand un inconnu vous aborde pour demander qui vous êtes :
Je suis un mammifère, appartenant à la classe moyenne, ayant des tendances névrosées agrémentées de TOC, m’inscrivant dans une société occidentale capitaliste.
Pas très glamour !
J’ai donc je suis
Réfléchissez un instant : comment vous présentez-vous à un inconnu ? Cette présentation diffère-t-elle selon le contexte privé, professionnel… ?
Faites l’exercice et prenez une feuille pour écrire 5 réponses à cette question banale.
… Ressentez-vous le stress de la page blanche ?
Vie professionnelle
Souvent, l’on va commencer par se définir professionnellement. Que ce soit par nos études ou le poste que l’on occupe, se présenter comme un travailleur semble être la priorité.
Donner le titre de sa profession suffit rarement : il faut pouvoir se situer par rapport à celle-ci, et tenter de s’attirer des regards admiratifs, voire jaloux. Car se définir par le critère professionnel est souvent lié au désir de se distinguer professionnellement et être le n°1. Cette recherche de la performance à tout prix cache en réalité une recherche de reconnaissance : être le préféré.
Mais revenons à ce choix de présentation par le biais professionnel : pourquoi ce premier comme choix de critère ? Est-ce parce que le critère professionnel est celui qui nous définit le mieux ? Ou est-ce plutôt le volet de soi le plus simple à présenter, le plus « extérieur » et donc le moins intime ? Dire « je suis dentiste » répond à la question (imprécise) et évite de s’engouffrer dans une réflexion sur soi plus poussée.
Pourtant, lorsque l’on sait que beaucoup de jeunes passent par une période indéterminée de chômage après les études, que la crise amène son lot de licenciement et que simplement, actuellement, les gens ne restent plus toute leur carrière dans la même boite à la même fonction, on peut d’autant plus se poser la question de la pertinence de ce choix de présentation.
Personnellement, mon choix d’études s’est joué à peu, et je n’ai exercé ma profession que quelques années ; depuis j’ai changé plusieurs fois d’activité professionnelle… J’ai donc perdu cette « mauvaise habitude » de me présenter par le biais de mon activité professionnelle. Mais avant d’en arriver là, le chemin fut rude, car en plus de la perte de repères, je me présentais en marge d’une société « fière de ses travailleurs ».
Après le professionnel, le physique ?
Vous avez déjà surement joué au jeu du « mais oui, tu sais, la grande blonde qui travaille au 4e étage, toujours habillée en tailleur… » : les descriptions aident à la reconnaissance, mais est-ce tout ?
De nombreux clichés et préjugés se cachent derrière les descriptions physiques, dont certains peuvent faire mal. Nous nous faisons une idée sur les gens très rapidement : quelques secondes suffisent dans une première rencontre pour « ranger » l’inconnu que nous avons face à nous.
Ces jugements sont issus de nos expériences passées, mais également des interprétations (conscientes et inconscientes) que nous faisons à partir de la communication non verbale. Celle-ci englobe autant les aspects physiques que l’habillement ou encore la façon de se mouvoir et de parler.
La communication non verbale, telle une carte de visite, est un moyen de se présenter au monde : selon la tenue (vestimentaire et globale) et la façon d’entrer en contact avec le monde, nous donnons chacun un premier aperçu de nous, volontairement ou non.
Vie privée
« Je suis marié, j’ai 40 ans, deux enfants, un chien… » : qui vous imaginez vous ? Surement le cadre moyen, vivant dans sa maison confortable avec sa petite famille, bien rangé. Peut-être cet homme est-il un grand passionné de montagne et de grand froid, absent la moitié de l’année pour étancher sa soif d’aventure… ? Les préjugés ont, ici aussi, une place royale.
La notion d’âge est également utilisée de manière abusive pour se faire une idée sur les gens. Combien de fois un jeune ne s’est-il vu pris de haut, car « il n’y connait rien » ou « n’est pas intéressant commercialement »… En plus de ces considérations, l’âge est également utilisé comme un critère de jugement de la maturité de notre interlocuteur. Consciemment ou non, un jeune adulte ou un quadragénaire ne se verront pas réserver le même accueil, même si leurs propos ne diffèrent en rien.
Tous ces critères, professionnels, physiques et privés, ont un point commun : en les utilisant, l’on se définit par ce que l’on a plutôt que par ce que l’on est : on a un boulot ou un diplôme, on a un mari et des enfants…
Comment sortir de l’avoir pour l’être ?
Se définir par l’être est un exercice difficile, car il renvoie à la question : qui-suis je réellement, derrière tout cet habillage d’avoir ?
Adjectifs qualificatifs et traits de personnalité
L’amalgame est vite fait entre qualificatif et personnalité :
– Je suis d’un naturel taiseux
– Ah c’est un timide, un introverti…
Quel est donc l’intérêt de se classer dans ces cases prédéfinies : introverti/extraverti, dominant/dominé, créatif/pointilleux… ?
Il s’agit là d’une première approche de réflexion sur soi, qui dans l’absolu peut être intéressante : mais il ne faut surtout pas en rester à cette introduction. Elle permet ainsi de lancer le mécanisme de réflexion sur soi, qui n’est pas naturel pour tout le monde.
Les gouts et les passions
Une autre possibilité, après les qualificatifs, est de se définir par ce qui nous anime, ce que l’on aime, ses gouts et ses passions.
J’aime cuisiner, j’aime lire, j’aime la photographie, j’aime la randonnée et la plongée…
Cette approche à l’avantage d’être créative et positive : se positionner comme un être aimant est se positionner comme un être vivant. Quelqu’un qui n’est animé par rien n’est plus dans un mouvement de vie (par exemple dans une phase dépressive plus ou moins masquée).
Mais est-on ce que l’on aime ? Quelle différence peut-on faire entre aimer voyager et être voyageur ? Une différence d’intensité, de régularité, d’importance… ?…
Utilité de cette torture de cerveau
Cette remise en question des conventions sociales pour un recentrage sur soi est utile, voire inévitable.
Il vient toujours un moment dans la vie ou l’on se sent perdu, déphasé, suite à des chamboulements qui viennent bousculer les critères par lesquels l’on se définissait et sur lesquels on appuyait ses représentations du monde : une séparation conjugale, un deuil, un changement d’emploi ou de cadre de vie…
Devancer ces moments de questionnements, en ne s’oubliant pas au coin de la rue pour continuer sa vie en mode de pilotage automatique, permet d’éviter les plus gros chocs, les crises de la quarantaine et autres, et de rester connecté à son centre vital, à ses rêves et projets de vie. Une telle hygiène de vie psychologique, tenant de l’idéal, fournit une force mentale nécessaire pour traverser les écueils de la vie. Ainsi, une identité avec de bonnes fondations permet de résister aux épreuves du temps :
Le roseau plie, mais ne rompt pas. (Lafontaine)
Hommes nous sommes…
L’Homme est un objet difficile à définir dans sa singularité : nous sommes tous semblables et pourtant si différents.
Anthropologie, sociologie, critère professionnel/privé/physique, gouts et couleurs… Il n’existe pas d’approche toute faite pour se définir. Cette question, débattue depuis la nuit des temps, ne peut trouver une réponse unique : cela serait simpliste et triste d’y répondre en quelques lignes. L’intérêt est ici tant le questionnement que la question.
Ces réponses (et ces questions) sont-elles conditionnées par notre appartenance à une société et à un genre ? Surement ! Des psychologues ont noté des tendances de réponses différentes selon le sexe, les hommes basant davantage leur réponse sur l’action, là où les femmes favorisent des réponses dans l’être et l’affectivité.
La culture a aussi toute son importance face à ce questionnement. Par exemple, les bouddhistes se détachent de ces préoccupations en relativisant l’importance du « moi », illusion et cause de souffrance. Rechercher la satisfaction d’un moi éphémère n’a pas de sens dans cette philosophie de vie.
L’art et l’homme ont beaucoup en commun. Une œuvre fade et classique plaira modérément, mais au grand nombre, alors qu’une œuvre plus audacieuse sera rejetée par la masse, mais passionnera un nombre restreint d’admirateurs. N’en est-il pas de même pour l’Homme ? Celui qui se contente de la sécurité des chemins balisés et des clichés sociaux aura la satisfaction d’être « in » et, en suivant les modes, de plaire (ou en tout cas de ne pas déplaire) à la majorité. Alors que celui qui, respectant le vieil adage de Socrate, se connaitra et suivra pour tout chemin celui vers la réalisation de son être, original et unique, pourra déplaire et déranger au grand nombre autant qu’il plaira à une communauté restreinte.
L’Homme, tout comme l’art, se définit et se construit dans son environnement. L’Homme fait le monde autant que le monde le façonne.
Et vous, qui êtes-vous ?
Bonsoir Amandine,
Voilà un article bien philosophique en ce dimanche ! 🙂 En ce qui me concerne, je pense que le voyage permet cette remise en question nécessaire dont tu parles car en voyage tu es moins obligée de tricher pour « avoir l’air de… », pour rentrer dans les cases, dans le moule… En voyage, tu te libères et tu peux davantage être toi-même !
Donc en ce qui me concerne, je suis une voyageuse ! 🙂 Du moins j’essaye ! 😉
Merci Nath’ pour ton commentaire, et oui, il m’arrive de partir dans des réflexions assez philosophiques … même le week-end 😉
Pouvoir être d’avantage soi-même en voyage est un point sur lequel j’aime réfléchir ; j’avais déjà ébaucher cette réflexion avec l’article sur la zone de confort et celui sur la confiance en soi, entre autres dans un échange dans les commentaires avec Laurent de One Chaï.
Bonjour Amandine,
Une belle réflexion ce matin. On voit que la psychologue en toi ressort ( bien sur je fais un clin d’oeil à ton texte). C’est difficile de se définir effectivement. On a souvent tendance à la faire selon les standards de notre société. Lorsque j’étais étudiante, je me définissais toujours ainsi. Pas seulement dans les dires, mais également dans ma tête. Mon meilleur ami m’avait dit, lorsque tu finiras tes études tu trouveras cela très difficile, car tu ne pourras plus te définir comme une étudiante. Chose que j’étais depuis très longtemps. J’étais à l’époque en grosse remise en question existentielle et effectivement être étudiante était mon point d’ancrage. Lorsque c’est arrivée j’ai dû me redéfinir autrement dans ma tête et aux yeux des gens. Je suis certes professionnelles aujourd’hui, mais ce n’est plus l’image que je projette aux gens. J’ai beau être directrice d’un organisation, mais je préfère qu’on me reconnaisse comme la voyageuse. J’ai acquis cette réputation au fil des ans, car je voyageais beaucoup et laissait souvent tout tomber pour partir sur les routes du monde. Mais là que je suis en couple, plus stable avec un boulot plus stable et que mes voyages sont plus planifiés, j’ai eu peur de reperdre ce titre encore une fois. C’est ridicule, maintenant je me définis davantage à travers cela, car j’y avais comme trouvé une voie qui était la mienne et qui différenciait de celles des autres. Alors que fondamentalement je ne suis pas que ca.. C’est difficile de savoir qui on est dans sa globalité sans focuser sur un aspect. Bref, voilà. Une bien belle réflexion que tu amènes là ce matin et qui m’a inspiré 🙂 Bravo!
Merci pour le clin d’oeil 😉
Contente que mes petites tortures psychologiques masochistes t’inspirent 😉
Difficile effectivement de pouvoir se sentir « complet » ou « solide » dans son identité, d’autant plus quand on passe un cap. Lorsque j’ai eu mon diplôme, j’ai travaillé quelques mois pour renflouer les caisses, puis je suis partie plusieurs mois en voyage en Amérique Latine. Lorsque l’on me demandait ce que je faisais dans la vie, j’avais beaucoup de mal à savoir quoi dire : étudiante ? ha non, c’est fini ! Psychologue ? Mais je n’ai pas encore commencé à travaillé ! Alors je glissais sur un autre terrain que celui du domaine professionnel, pour retrouver pieds.
J’aime beaucoup l’étiquette de « voyageur », elle m’amuse particulièrement dans le regard de « non-voyageurs » : ils s’imaginent que je me transforme en Indiana Jones à chaque voyage je pense … il faut croire qu’on est tous l’aventurier de quelqu’un 😉
ahahaha c’est tellement vrai. Dans le regard des autres on est dont courageux! Pourtant pour nous c’est tellement naturel et accessible à tous. Mais à force de parler avec les gens je me rends compte que ce n’est pas si accessible à tous. Les gens sont craintifs, ils ont peur de l’inconnu, ils ont besoin de leur sécurité, de leur confort. Ils n’ont pas d’intérêt pour l’ailleurs autre que par la télé qui leur suffit. Ca me met toujours un malaise quand ils me disent que je suis courageuse, car je comprends tellement pas pourquoi ils disent ca. Je me sens tellement pas ainsi! Mais bon j’aime bien tout de même être l’aventurière de ces gens. Celle qui leur apprend des choses, qui les fais voyager sans rien craindre. je suis un peu leur fenêtre sur le monde et j’aime bien ce rôle 🙂
Comme dans le business, il est bon en voyage d’avoir le réflexe du pitch elevator. Une présentation de 30 secondes pour la police, une minute pour les commerçants et trois minutes pour se présenter à d’autres voyageurs 🙂
Je dois être un peu Bouddhiste sur les bords !
Parfois en voyage, pour un visa ils te demandent la profession et si tu voyage tu ne « professionne » pas donc tu écris « Voyageur ». Mais quand je dois écrire cela je sens une résistance en moi. Je ne dis jamais « je suis » mais « je voyage/travail comme/fait ceci ou cela… ».
Dans tous les domaines, il y a du bon et du mauvais, si tu dis je suis « Voyageur », cela englobe le passionné de voyage, le fuyard, le touriste « malsain »… cela n’a donc absolument aucun sens.
Et si demain tu venais à être malade et dans l’impossibilité de voyager alors tu ne serais plus personne ? Toutes composantes externes devraient être écartées de la définition du Moi, je suis d’accord.
Le physique lui même et la personnalité elle même peuvent changer au cours d’une vie, il est donc inutile de se définir par ces critères. Tu parlais de confiance en soi dans un précédent article, on peut en être dénué au départ et faire preuve d’une grande confiance en soi quelques années plus tard, la personnalité a donc changé et pourtant la personne est toujours la même.
Il n’y a donc qu’une seule et unique chose qui ne bougera jamais, c’est la personne. Et là tu va me demander qu’est ce que la personne et je vais te répondre les émotions profondes qui nous animes pour te répondre quelque chose mais mes capacités intellectuels ne me permettent pas (encore !) d’approfondir la réponse. Cela fait partie des choses que je sens mais sur lesquelles je n’arrive pas à mettre des mots !
Est-ce que cela est bien nécessaire d’ailleurs ? Est ce qu’un chat se demande qui il est ? Pourtant il est lui même plus que n’importe quel humain.
Salut Bertrand,
C’est drôle, lorsque je voyageais, et que je n’avais pourtant pas encore « professé », j’écrivais le titre de mon diplôme. Il ne me serait pas venu l’idée de mettre « voyageur », statut que je savais alors temporaire. Pour autant je ne me sentais pas psy non plus … Je prenais ça avec recul, comme une grande mascarade vide de sens et pleine de rigueur administrative, faisais un grand sourire au douanier et bouclais ainsi mes questionnements intérieurs !
Finalement, tout est changement : notre environnement, notre physique, notre statut, … et nous-même, nous évoluons également … La seule stabilité là-dedans, c’est la certitude du changement ! Bien sûr, lorsque je parle de notre évolution personnelle, je fais allusion plus à une évolution qu’à des changements radicaux : mais je pense n’être plus tout à fait la même que cette adolescente qui écoutait des musiques qui me font sourire aujourd’hui !
J’aime ta vision du « noyau » de la personne dans ses émotions profondes, même si nos capacités à intellectualiser cette réponse reste limitée (je me joints à toi dans cette frustration 😉 ).
On ne peut pas toujours tout nommer, et comme tu le dis, mettre des mots sur tout n’est ni utile, ni même profitable. Certaines choses doivent être vécues et ressenties, plus qu’analysées et décryptées (ou alors dans un autre temps, avec recul).
Serait-ce le propre de l’homme de se torturer sur sa condition humaine ?!
Le propre de l’homme de se torturer l’esprit ? Je ne pense pas. Le propre de l’homme inconscient seulement. Durant la grossesse (il parait que l’on commence à penser très vite) ou durant les premiers mois ou années de la vie, on ne se torture pas l’esprit avec ces questions, on est juste nous même, plus que jamais, et pourtant déjà homme. J’ai pris l’exemple d’un chat mais j’aurais pu prendre celui de l’enfant. Le propre de l’homme est de retrouver la sagesse de la petite enfance après le tsunami qu’est l’adolescence, mais consciemment cette fois !
Quand tu vis en harmonie avec toi même, dans le flux, tu cesse immédiatement de te poser toutes ces questions. En voyage tout cela me passait au dessus de la tête, je savais pourquoi j’étais là et où j’allais, et à la question « qui suis-je » ? Il n’y aurait eu qu’une réponse : « Je suis bien » 🙂
Mais il y a beaucoup plus compliqué que de savoir ce que tu veux dans la vie ou qui tu es : le faire entendre à l’entourage sans que cela ne créé un second tsunami 🙂
Salut Amandine !
Ton article est très intéressant et il sort du cadre des articles voyages que l’on trouve habituellement sur les blogs. Je pense en effet que la question « qui suis-je », ou « qui es-tu », est largement définie par des codes sociaux, et en fonction des pays, elle induit souvent des choses différentes. En Inde, on m’a demandé 50 000 fois si j’étais mariée ; et la question qui venait ensuite : Mais où est ta famille ?
Pour ma part, je ne pense pas que savoir se définir avec des mots et toujours essayer de se questionner pour savoir qui on est, est très important. Je suis le plus souvent absolument incapable de mettre de mots sur ma personnalité. J’en apprends bien davantage par le biais d’autres personnes qu’en me questionnant moi-même. Par exemple, une remarque de mes parents sur un de mes traits de caractère va mener à une discussion et c’est grâce à eux que je réalise que cette particularité me définit.
Peut-être que, plus que de savoir qui on est, l’important est de savoir qui on veut être, pour être capable d’aller de l’avant et s’améliorer ; devenir une « meilleure personne ». Cela me donne un sens, quelque chose sur laquelle je peux avoir une réelle influence, plus que de chercher à savoir qui je suis.
Bref, vaste question !
Oh, et je voulais aussi ajouter que quand je voyage sur une longue durée, il y a toujours un moment où les premières questions d’introduction lorsqu’on rencontre quelqu’un du genre « Tu viens d’où, tu fais quoi dans la vie ? » commencent sérieusement à me lasser ! Toujours devoir se présenter et répondre aux mêmes questions 3 fois par jour pendant des semaines de voyage… Il y a souvent un moment où je commence à saturer :p
Salut Joana,
Merci pour ton commentaire – effectivement mon article sort du cadre « stricto senso » du voyage, et j’ai d’ailleurs beaucoup hésité avant de le sortir, le travaillant par petits bouts plus pour moi, sans certitude que je le partagerais … Si François n’avait pas été à côté, pas sûr que je l’aurai publié hier soir, je l’aurai peut-être laissé mijoter à feux doux. Contente que tu trouves le sujet intéressant 😉
Je retrouve assez bien l’Inde et la représentation de la femme dans les questions que tu évoques ici. Comme toi, j’ai suis très résistante à me coller des étiquettes et rentrer dans des boîtes toutes prédéfinies. Se définir grâce aux autres fait partie intégrante du processus de connaissance de soi. Lorsque l’on est enfant, cette composante est la plus importante. En grandissant, on l’oublie souvent, et oser aller chercher du « feed-back » est rare. J’ai une amie, un peu perdue, qui a fait cette démarche, qui en a étonné plus d’un – sans chercher à se voir jeter des fleurs « tu es gentille, intelligente, … », elle cherchait avant tout un retour honnête sur elle. Exercice difficile (autant pour la personne qui cherche à se définir que pour l’entourage qui cherche alors à répondre à sa demande !).
J’aime beaucoup ton idée de se projeter dans le futur et dans son « soi idéal » : garder le cap grâce à ces objectifs : je veux être courageuse, ouverte, … La vie te fournira alors milles et unes occasions de le devenir, à toi de les saisir ! J’ai un peu cette philosophie-là moi aussi. Ne pas s’appesantir sur le négatif d’aujourd’hui, mais sur le positif de demain et comment y arriver, c’est beaucoup plus dynamique.
Je vois que toi aussi, tu satures en voyage face à ces éternelles et mêmes questions « qui es-tu, tu viens d’où » … J’ai été étonnée des questions que l’on me posait sur moi, ma famille et le pays d’où je viens. La question de « ma religion » faisait partie des points d’intérêt principaux en Amérique latine – question qu’on imagine moins en Europe. Et j’ai du me creuser les méninges pour pouvoir répondre à celle de « que produit ton pays ». « Oui, en Bolivie, on produit du Quinoa, … et chez vous ? » … gros blanc : je ne sais pas ! On produit quelque chose en Belgique ? Ha oui, des armes :s