À la suite de l’annonce de notre projet d’année sabbatique de voyage à travers les Amériques (« Back To America »), les réactions ont été assez variées. Mais beaucoup m’ont répondu :
« Mais vous n’avez pas déjà fait ça ? »
Derrière cette question se cache l’incompréhension face à ce besoin de « repartir » en voyage et de retourner en Amérique latine.
Back To America : retour au voyage
Oui, je suis déjà partie en voyage. J’ai fait des voyages de toutes sortes : en Europe, en Asie, en Amérique du Nord et du Sud (pas encore en Afrique ni en Amérique centrale ou en Océanie : j’espère réparer « ce mal » … Mais le monde est vaste, soyez indulgents !). J’ai déjà voyagé en avion, en bus, en train, en voiture, en voilier, en vélo, en scooter …
Mais de voyage au long cours, je n’en ai vécu qu’un seul jusqu’à présent …
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Repartir en voyage au long cours
Quels que soient la destination et le mode de voyage, c’est le retour sur les routes en tant que tel qui nous manquait (lire l’article : « Les premiers instants : comme un goût de déjà-vu »).
« Back To America » est un voyage au long cours, sans date de retour prévue : nous avons un billet aller et c’est tout … Et c’est même déjà beaucoup pour nous, qui avions mille et un plans, du plus raisonnable au plus loufoque, pour atteindre le nouveau continent : en cargo, en voilier, descendre la route de Saint-Jacques de Compostelle à vélo jusqu’au Portugal et tenter le bateau-stop … Bref, nous nous trouvons très raisonnables dans nos choix, malgré ce qu’en pensent certains !
Pourquoi partir un an ?
C’est aussi une question que l’on me pose souvent. J’ai juste envie de répondre :
Pourquoi pas ?
Parce que nous avons la chance de pouvoir économiser et partir sur les routes sans difficulté. Parce que je me sens libre et sans contraintes insurmontables. Je pars parce que je le peux et, tout simplement, parce que je le veux !
Le voyage au long cours apporte une dynamique totalement différente des autres voyages. J’en parle plus en détail dans l’article « Voyage au long cours VS citytrip ».
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Repartir en Amérique latine
Si c’est le retour au voyage qui importe tant, pourquoi repartir sur un continent « déjà vu » ?
À tous ceux qui me posent cette question sans cesse, je n’ai pas de réponse logique à vous avancer. Mais faut-il forcément avoir une bonne raison pour décider de voyager et choisir sa destination ?
De plus, je peux vous garantir que nous n’avons absolument pas « tout vu » ! C’est d’ailleurs un objectif impossible.
Par exemple, le Pérou, pays par lequel nous commencerons notre voyage, est également celui dans lequel nous avons passé le plus de temps au total (6 semaines), et il nous réserve encore de belles découvertes !
Qu’est-ce qui vous attire tant sur ce continent ?
Des couleurs, des ambiances, des paysages, des cultures, des histoires … Loin de vouloir placer les continents ou pays sur une échelle de valeur ou d’intérêt, je pense simplement que certaines personnes vont avoir spontanément une attraction plus grande pour certaines régions du monde.
Promenade en cheval dans le Canyon des Incas, Tupiza, Bolivie Ruelle du centre de Cuzco Joueur de flûte de pan Processus de création des tissus colorés Jeune lion de mer venu jouer Cette attraction peut exister de manière absolue et perdurer, ou être relative, liée à un moment donné de son existence et évoluer avec le temps.
Pourquoi certains sont-ils obnubilés par l’Asie du Sud-Est, l’Inde, ou l’Australie, les États unis … ?
Sans doute est-ce dû à une multitude d’images enregistrées plus ou moins inconsciemment, nous créant des représentations sur ces destinations, les rendant plus ou moins attirantes. La démarche réflexive sur les origines de ces représentations peut être très intéressante et permettre de les remettre en question. C’est la démarche que souhaitait réaliser Aline de NowMadNow en se rendant en Israël pour sortir des images médiatisées et se forger sa propre représentation de ce pays. Une démarche que j’admire beaucoup.
Notre démarche n’est pas aussi réfléchie : nous avons aimé nos précédents voyages sur ce continent … et loin de nous rassasier, ils nous ont mis l’eau à la bouche, levant un coin du voile sur tout ce qu’il nous reste encore à découvrir.
Du désir de partir au besoin de repartir
Pourquoi repartir pour un long voyage ?
Notre dernier voyage au long cours (j’entends par là plusieurs mois) date de 2009. Cela fait donc 5 ans.
Oui, entre-temps, nous avons continué à voyager par des escapades de quelques jours voire d’un mois, mais ce n’est définitivement pas la même chose.
Cinq années se sont écoulées … Certains avaient oublié les paroles que nous répétions au retour de ce premier grand voyage : « nous repartirons dans 5 ans ». Nos fréquentes évasions n’étaient que des hors-d’oeuvre pour nous faire patienter, alors que nous construisions peu à peu notre projet de retour sur les routes. Pourquoi attendre 5 ans ? Pour économiser, se lancer dans le monde du travail et, surtout, correspondre aux critères d’accession au « crédit temps » (pause carrière en Belgique). Oui, notre départ était prémédité, et de longue date.
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Le virus du voyage
On me demande souvent si j’ai toujours voulu voyager, ou comment cette passion m’est venue, et est-ce que François la partage avec la même intensité… ?
Bref, comment as-tu été contaminée par le virus du voyage ?
Puka Pukara, Cuzco (Pérou, 2013) Je ne sais pas non plus donner une réponse cohérente à cette question (décidément !). Peut-être simplement parce qu’il n’y en a pas. Une passion, par définition, cela n’a rien de logique.
« Le cœur a ses raisons que la raison ne connaît point. » (Blaise Pascal)
J’ai toujours aimé partir en vacances, depuis toute petite. Mais petit à petit, le voyage a pris une autre dimension et une place plus importante dans ma vie. Dans nos vies. Le voyage est devenu un projet de couple, une philosophie et une façon de penser.
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Le mal du retour à la vie sédentaire
Beaucoup de voyageurs connaissent ce mal : celui de se sentir étranger dans sa propre culture. De retour chez soi, passé la joie et les effusions des premières retrouvailles, vient une phase bien moins agréable. Tel un personnage de Camus, le « back-traveler » réalise, face à ce monde qu’il avait quitté et qui est resté pareil, à quel point lui-même a changé.
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Le voyageur, cet étranger…
Au-delà des considérations physiques, telles que le bronzage ou la longueur des cheveux, le voyageur de retour ne peut expliquer qu’il n’est plus tout à fait le même que celui parti quelques mois auparavant. Sa vision du monde a changé. Ses envies et ses espérances de vie ont changé. Comment imaginer, une fois le point « faire le tour du monde » barré de sa Bucket List, qu’il puisse tranquillement se dire :
Check, ça c’est fait ! Retournons à la « vraie vie » à présent ?
Non. Juste non ! Le voyage n’est pas « une fausse vie », et se dire qu’une fois la bulle d’air du voyage consommée, il n’y a plus aucune autre possibilité que de rentrer dans le rang, plus d’autres folies à réaliser que de se sédentariser … Non !
Le voyageur a changé. Et cela l’effraye tout autant que la perspective morbide de ne plus désirer voyager. Le voyage perd alors son statut de « simple désir » et se transforme en un besoin. Voyager pour continuer à faire partie de ce mouvement plein de vie. Voyager pour ne pas perdre cet élan. Voyager pour poursuivre l’exploration du monde. Voyager pour rester vivant.
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Entre difficulté de (se) dire et difficulté de (se) comprendre
À la difficulté d’exprimer ce sentiment s’ajoute une certaine barrière d’incompatibilité du côté des interlocuteurs : le voyageur parle alors une langue que personne ne comprend. L’importance de ce qu’il a vécu et les conséquences de ce voyage sur sa construction personnelle sont minimisées, voire complètement ignorées par la majorité.
Cet étrange sentiment au retour est sans aucun doute la partie la plus difficile du voyage. Et une des raisons qui poussent les voyageurs à repartir.
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Je repars parce que !
Je ne m’attends pas à ce que tout le monde me comprenne. Je n’en ai pas besoin. Certains m’encouragent, d’autres même me félicitent pour mon courage (ce qui me surprend et m’amuse toujours un petit peu) … et beaucoup me regardent comme une bête curieuse qui pourra les distraire cinq minutes, mais qui les lassera rapidement, à force de parler de tous ces pays visités (voire attisera leur jalousie).
Je pars parce que c’est mon choix. J’ai souvent du mal à prendre des choix : choisir, c’est renoncer. Pourtant il y a certains choix, aussi importants qu’ils puissent être à l’échelle d’une vie, que je prends sans aucune difficulté. Et partir pour cette année sabbatique en fait partie.
Dans moins de 90 jours, nous sommes de retour :
America, nous voilà !
Et vous, avez-vous déjà vécu un retour de voyage au long cours ? Quel était votre état d’esprit ?
- Retour sur notre projet « Back To America » : La cerise sur le gâteau dévoilée
- Mise à jour de notre voyage : Projet 2015 : attention changements !
- Entre nos deux grands voyages, de « Back To America » à l’Asie : Retour de voyage : la douce insolence…
- Retour de voyage : la tête dans les nuages
- Le voyage, un aphrodisiaque ?
Bonjour Amandine
Très bel article … qui me rassure sur le fait qu’on a tous le droit de voyager sans avoir à se justifier, et pouvoir retourner dans un endroit qui nous a profondément attiré ou marqué avant d’avoir explorer un autre pays … chacun est libre de faire ce qu’il veut ! Et comme tu dis, on n’a jamais TOUT vu d’un pays.
J’aurais une petite question, si tu as un avis la dessus : actuellement en Nouvelle Zélande, je pense beaucoup à passer par l’Amérique du Sud avant de rentrer en France. (très attirée par ces régions pour les mêmes raisons que celles que tu avances!)
Penses tu que voyager seule est « dangereux » dans ces pays ? J’entends par là, une fille seule, sac à dos, surement par bus et en auberge de jeunesse voire Couchsurfing …
Merci et très bonne continuation et très bon voyage 🙂
Bonjour Maud, merci pour ton commentaire et ton retour 🙂
Concernant la sécurité en Amérique latine : le continent est vaste, chaque pays à ses spécificités et chaque ville à ses quartiers plus ou moins bien fréquentés (comme partout !). Donc difficile de généraliser.
De manière générale, cela dépend aussi de l’expérience du voyageur et sa capacité à anticiper les soucis, à son attitude …
Maintenant que je suis allée au Cambodge, je peux « un peu comparer » le niveau de sécurité entre Asie – Amérique du Sud – et Europe.
Ainsi par exemple :
Chili et Argentine : à peu près comme en Europe ;
De manière générale l’Asie est plus tranquille (au niveau risque de vol – même si on ne s’est jamais fait volés lors de nos voyages en Amérique du Sud);
Dans certains pays/ville, éviter les taxis (par exemple Bolivie) …
Mais mes conseils se basent sur mon vécu personnel et mes souvenirs : mes expériences datent, pour certains pays, de + de 5 ans !
A mes yeux, il n’y a aucun soucis à voyager dans ces pays seule. D’autres l’ont déjà fait avant 🙂
Très bonne continuation à toi aussi !
Bonjour, je me permets de te répondre Maud, car nous sommes partis il y a 2 ans en Amérique centrale et du sud pendant 7 mois et cela peut faire un peu peur. On entend souvent dire que l’Asie est beaucoup plus safe que l’Am du Sud…alors oui je crois que c’est vrai que les mentalités sont différentes, qu’il y a plus de vols et d’agression mais une fille toute seule peut tout à fait voyager là bas sans tomber dans la psychose. Peut être seulement que les mises en garde de base sont à prendre plus au sérieux et qu’il faut être un peu plus vigilant…Mais ce serait tellement dommage de passer à coté de ce magnifique continent! Bon voyage
Bonjour et félicitations pour votre projet!
Je comprends tout à fait ce que tu écris dans cet article : la réaction des proches, le retour au bercail parfois un peu en « choc des cultures » et ce sentiment des autres mitigés entre « profitez-en » mais avec un petit soupçon de jalousie quand même… Beaucoup de personnes de mon entourage me disent : « moi aussi un j’irais à …. ». Sauf que « un jour » c’est souvent jamais! Toujours une excuse, un emploi du temps chargé ou une fatigue passagère…
Toujours est-il qu’une fois qu’on a le fameux « virus », la seule chose à laquelle on pense une fois rentré…c’est repartir! Et parfois nous ne sommes pas encore entré que nous réfléchissons déjà à une prochaine destination!
Ce que je préfère dans tout ça, c’est d’avoir une date, une échéance qui va casser ma routine et me faire rêver d’ailleurs (nous partons quasiment tous les 2-3 mois)! Tout ça n’a pas de prix (enfin si ça en a un mais ça les vaut bien!!!) .
Quand à partir toute une année… Le top!!!
Vous avez bien raison, profitez en bien. Et bon voyage à vous en amérique 😉
Mylène
Bonjour Mylène, merci pour ton message et les félicitations 😉
Le « Un jour » qui se transforme en « jamais », c’est le scénario du début du dessin animé « Up », et c’est aussi mon pire cauchemar !
La vie passe tellement vite …
Pas encore rentrés et déjà à penser à vos futurs voyages ? Je comprends ça tout à fait, et je pense même que c’est important de se projetter dans le futur, de penser au retour et de se créer de nouveaux projets, histoire de limiter le choc et le coup de déprime du come back !
C’est toujours agréable d’échanger avec d’autres passionés de voyages en tous genres 😉
Hello!
Merci de cet article qui me replonge en effet dans le « jugement » de certaines personnes (qui elles ne sont pas autant « réceptives » ou tout simplement jalouses de notre vie!).. bref, moi aussi, j’attire les questions… tu repars ? encore ???
C’est vraiment pathétique tout ça… ahahhahaah !
Je me rends compte que quoiqu’on fasse, y aura toujours quelqu’un pour dire : elle a de la chance (faux, je créé ma chance!), elle a des sous (faux, j’économise pour partir!), elle est pas stable (faux ! c’est quoi la stabilité!?), donc de toute façon il y aura toujours des gens qui critiqueront.. et là c’est exactement comme tu l’écris dans ton article.. c’est une force qui te pousse à repartir… c’est vital… c’est nourrissant…
C’est une sensation obligatoire pour moi.. pour apprendre, me déconnecter, réfléchir, m’inspirer, respirer, découvrir ou redécouvrir, bref, ailleurs, où je me sens vivante oui !
Je pars au Québec très bientôt (pour des vacances et me renseigner sur l’immigration!) et c’est mon 3ème voyage de l’année.. oui oui, c’est une drogue… je n’y peux rien !
J’aime beaucoup les mots que tu as utilisés et qui me parlent beaucoup aussi : « Voyager pour continuer à faire partie de ce mouvement plein de vie. Voyager pour ne pas perdre cet élan. Voyager pour poursuivre l’exploration du monde. Voyager pour rester vivant »
C’est exactement ça, alors moi je dis: GO GO GO !!! On a qu’une vie n’oublions pas!!
Il faut faire les choses pendant que l’on peut!
Belles aventures !
A+
Séverine
Bonjour Séverine, merci pour ton commentaire 🙂
Je vois que je ne suis pas la seule à être confrontée à ce genre de réactions !
Je retrouve dans tes propos cette énergie vitale que j’ai décrit dans l’article « Le voyage, un aphrodisiaque ? », qui je pense devrait te plaire 😉
Très beau projet ton voyage au Canada … J’y suis restée une demi-année pour un stage, et j’ai bien en tête d’y retourner un jour 😉
Profite bien, vis et voyage ! 🙂
Pourquoi, certains vous disent que vous ne devriez pas repartir en Amérique, pas repartir au long cours ? C’est ce qui semble ressortir de l’article, mais ça m’hallucine quelque peu, ça ne me traverserait pas même l’esprit de me poser ce genre de questions :). Chacun suit ces intuitions et tant qu’elles ne pourrissent pas l’existence d’autres personnes alors il n’y a pas lieu de les discuter.
Bon voyage ;).
Salut Bertrand,
Je t’avoue que ces questions m’ont autant surprises que toi ! Je ne savais pas quoi répondre la première fois, puis c’est très vite devenu une question récurrente … D’où mon article 😉
Étrangement, beaucoup de voyageurs se sont étonnés de notre choix de destination ou de notre volonté de ne pas faire un « classique tour du monde ».
Comme tu le dis, chacun ses intuitions ! ^^
Du coup cela me fait penser à ton dernier article, sur le formatage de la société 😉
J’ai été coupée dans ma lecture, entamée avant de monter dans l’avion pour rentrer de Jordanie, je m’y replonge très vite : très intéressant, impatiente de lire la suite 🙂
Une superbe idée de repartir ! Je vous rejoint sur l’Amérique Latine c’est splendide et encore nous n’avons fait que 50% nous !
J’ai vécu un an au Brésil pourtant j’aimerai y retourner 🙂 Je ne trouve pas ça bizarre, c’est un peu comme la maison maintenant 🙂
Hey, merci Manu
(je prends du retard pour répondre aux commentaires ; mais comme cela me fait toujours plaisir de les lire, j’essaye d’y répondre au maximum ^^)
Difficile de dire qu’on a « fait » un pays et encore moins un continent ! Après deux voyages dans ces contrées, il nous reste tout ou presque à découvrir 🙂
J’imagine ton sentiment par rapport au Brésil ; habité 1 an à un endroit, et il devient comme une seconde maison. je suis restée une demi-année à Québec, et cette ville aura toujours pour moi quelque chose de particulier. j’espère y retourner un de ces quatre !