Tous ces petits moments en voyage où l’on se sent perdu·e, désorienté·e, déconcerté·e, dépaysé·e, touché·e… et que l’on déguste telles de délicates pâtisseries, éphémères et savoureuses. Voici une collection de ces petits moments griffonnés sur différentes notes lors de nos voyages au Japon.
Instants magiques
Le voyage, comme la vie, est une collection de moments. Certains beaux, touchants, émouvants. D’autres étonnants, perturbants… Et ce sont ces moments chargés d’émotions qui teintent mes voyages, leur donnent une couleur unique. C’est la quatrième fois que nous voyageons au Japon, et quand je pense à chacun de nos voyages, je me les remémore grâce à leur itinéraire, bien sûr, mais aussi et surtout via tous ces moments uniques.
J’ai commencé à écrire cet article lors de notre tout premier voyage au Japon, en mars 2016, et j’ai retrouvé mes notes alors que nous étions au pays du soleil levant pour notre quatrième voyage il y a un mois. J’ai décidé de vous les partager en y ajoutant un « nouveau » moment issu de ce dernier voyage… En espérant que cet article un peu particulier vous plaise !
5 moments au Japon
Au milieu de la nuit…
Mes paupières s’entrouvrent. J’ai dû entendre un bruit. À moins que ce ne soit l’appel de la vessie. Quelle heure est-il ? Il fait si sombre. Où est la porte de la chambre ? Elle devrait être face à moi, mais il n’y a qu’un mur… Et François qui devrait être allongé à ma droite, que fait-il à ma gauche ?
Ah, je me souviens. Je sais. Je ne suis pas à la maison. Ce n’est pas chez moi. Non, c’est sûr, je suis ailleurs. Mais où suis-je ? En voyage… Quel était ce dernier voyage ? Je suis revenue du Mexique. Et de Thaïlande. Et du Portugal… Ah, je sais ! Le Japon ! Je suis au Japon ! Mais où ? Il y a quelques jours encore j’étais à Kyoto. Mais nous sommes partis. En train. Je me souviens. Oui ! Nous sommes à Miyajima. Et la porte coulissante de ma chambre est à ma gauche.
Qu’ils sont bons ces petits moments de doute nocturne où le monde semble si petit et l’espace-temps si confus. D’un lit à l’autre, l’esprit s’embrouille et en perd le nord.
Au restaurant…
J’ai faim ! Les ruelles se remplissent de passants affamés sortis en quête d’un restaurant. En voilà un à notre gauche. Néons rouges et blancs, tissus gris suspendus au-dessus des portes coulissantes, grands panneaux blancs remplis de signes noirs. Magnifique, classique : je prends !
Je pousse la porte vers la gauche et me faufile à l’intérieur, immédiatement récompensée par une douce chaleur et le regard interloqué du cuisinier debout derrière son comptoir.
Konbawa. Bonsoir. J’appuie mon salut d’un mouvement de tête. Il me répond et me lance une tirade interminable… en japonais, bien sûr. Je le regarde en haussant les épaules et jette un coup d’œil aux assiettes de mes voisins. Il pointe du doigt trois panneaux dans son dos. Sans doute le menu. Je hausse les épaules une nouvelle fois, en signe d’impuissance face au mystère de cette écriture, et pointe du doigt l’assiette de mon voisin de gauche.
Le cuisinier sourit, me signe « OK » et se met à l’ouvrage. Ouf ! Ce soir encore, je ne mourrai pas de faim !
À la gare…
Depuis Himeji, nous arrivons à Hiroshima pour rejoindre l’ile de Miyajima, petit bijou qu’il me tarde de découvrir. C’est la carte postale classique, vue et revue tant de fois, de ce torii orange avec ses pieds dans l’eau… et qui me fait toujours rêver.
La gare donc. Avec ordre et efficacité, les voyageurs semblent suivre un parcours tracé dans le sol. Nos pas à nous sont bien plus hésitants et pesants. Dans quelle direction ? Où aller ? Mais sorti de nulle part, arrive alors un petit monsieur au grand sourire. Sur la pancarte qu’il tient en main, je découvre les mots : « Informations gratuites – Hiroshima ». Le Japon n’est décidément pas un pays comme les autres ! Avec patience, il nous conseille et nous accompagne jusqu’au quai du train qu’il nous faut prendre pour rejoindre le port et prendre le ferry pour Miyajima. C’est à peine s’il ne nous tenait pas par la main. Une sensation très nouvelle pour moi que de me sentir autant encadrée. Il nous explique qu’il fait ça bénévolement avec une association pour promouvoir le tourisme de sa ville.
D’où venez-vous, nous demande-t-il en anglais. Belgique ? Belgium ? Ah, Belouguie ! Ici on le prononce comme ça ! Ah, cela explique les mines étonnées de nos précédent·e·s interlocuteur·trice·s !
Nous laissant sur le quai avec quelques minutes à patienter pour le prochain train, nous sourions en regardant le monde qui nous entoure : si simple, si ordonné, si beau. Mais deux minutes plus tard, voici le petit monsieur à la pancarte qui revient en courant, les traits angoissés. Dans quelle langue vous ai-je donné les fascicules ? En anglais ? Je me suis trompé ! Les voici en français ! Désolé ! Désolé ! Essoufflé, mais heureux du devoir accompli, notre petit homme nous salue profondément et se retire, un sourire satisfait aux lèvres.
Décidément, les Japonais n’ont pas fini de nous surprendre…
Aux bains…
L’heure du bain. De la détente, de la douce chaleur enveloppante, du réconfort… Moi qui ne raffole pourtant pas des thermes et spas, je me retrouve à fantasmer sur le sento et l’onsen toute la journée.
Je me déshabille à la hâte et je rejoins la salle du bain public en faisant coulisser la paroi qui marque l’entrée. Entièrement nue, je jette un rapide regard circulaire autour de moi. Je ne suis pas seule : une vieille femme sort du bain, à moitié redressée. Elle s’arrête dans son élan pour me sourire.
Je ne me doutais pas que ce premier sourire serait le début d’un des moments les plus insolites de ma vie. Une expérience unique : recevoir un cours de vocabulaire japonais dans un bain public d’une vieille mamie tout aussi nue que moi.
D’une grande persévérance, mon professeur s’entête à me faire répéter les mots du jour accompagnés de gestes pour rythmer la parole. Konichiwa. Konbawa. Konichiwa… Le temps semble s’être arrêté dans ce sento où les vapeurs d’eau chaude se confondent avec les rires d’une enseignante autoproclamée et de son élève appliquée…
Dans une ruelle paisible…
François et moi marchons main dans la main, seuls au monde dans cette ruelle paisible après avoir quitté un temple de la région de Kyoto avec ses groupes de collégien·ne·s en visite scolaire. Je me sens bien, le soleil pointe le bout de son nez et dore les maisons de bois qui bordent la rue de part et d’autre. Je penche ma tête sur son épaule, lui dis des mots doux. Bonheur simple partagé sous un ciel bleu dans un décor nippon que nous aimons tant. Il s’arrête, me sourit et d’un geste plein de douceur, j’approche mon visage du sien et lui offre mes lèvres en le prenant dans mes bras.
Soudain, sortie de nulle part, une camionnette blanche tourne l’angle de notre rue. Surpris dans notre bulle de douceur hors du temps, nous nous prenons par la main et levons le visage vers le vieux monsieur aux cheveux blancs derrière le volant. Il sourit de toutes ses dents et, arrivé à notre hauteur, sort le bras par la fenêtre en nous adressant un « peace » de ses deux doigts tendus. Nous rions tous les trois le temps de cette rencontre éphémère et repartons chacun de notre côté, le sourire aux lèvres.
Tous ces petits moments, l’essence du voyage
Des moments doux, insolites et magiques au Japon, nous en aurions encore beaucoup à partager ! Si ce pays nous plait tant, ce n’est pas que pour ses temples, ses magnifiques paysages et sa gastronomie. Le Japon résonne dans nos cœurs de tous ces moments vécus et partagés, petites perles que l’on collectionne précieusement dans nos mémoires et sur ce blog pour ne pas les oublier…
Oh si poétique cet article <3
Le voyage est si doux, si agréable!
Merci Amélie ! 🙂
Oui, le voyage est plein de moments uniques, certains si doux et légers, à l’image de ces pétales de cerisiers qui volent au vent dans les animés japonais…
Coucou ! J’ai adoré cet article ! J’ai l’habitude de raconter les voyages à mes amis sous forme d’itinéraires, mais ces petits moments que l’on a tous en voyage sont comme un secret bien gardé avec son chéri, ou quelquefois avec soi-même. Tu les racontes très bien 🙂
Bonjour Amandine et François
De retour en Belgique?
On attend les nouvelles photos et articles de votre dernier séjour a Japon avec impatience. Du coup a présent vous avez eu toutes les saisons.
Votre gros coup de cœur pour ce pays nous a motivé a partir en Novembre (si planning congés validés).
Bonne continuation
Petits moments très bien racontés ! On s’y croirait !
Merci beaucoup Katell 🙂