C’est depuis la banquette arrière de notre voiture que je couche, une fois de plus, mais souvenirs de voyage. Souvenirs très frais, car alors que je tape ces mots, nous sommes sur le pont qui relie le continent à l’ile du Prince Édouard. Nous avons passé 3 jours sur cette ile dont nous ne savions rien avant d’y aller, et nous avons adoré !
De la Nouvelle-Écosse à l’ile du Prince Édouard
Pictou, dernière étape de notre roadtrip en Nouvelle-Écosse, pivot entre notre arrivée sur le continent américain et l’étape insulaire qui marque notre entrée dans une seconde province du Canada. La voiture embarquée sur le ferry, pendant une heure nous naviguons paisiblement. Une traversée entrecoupée par des moments de jeux et de rires, où Manoa aura l’occasion de jouer avec d’autres enfants… et un papi qui se sera mis à quatre pattes pour faire la course avec lui dans une allée. Même en écrivant ces mots, j’ai des difficultés à les croire. Et pourtant si, je l’ai vu, ce vieux monsieur un peu vouté par les années, de rares cheveux blancs sur la tête et un énorme sourire au visage.
« Profitez-en bien, ça passe trop vite ! », me dit-il avant de nous quitter.
C’est à Wood Islands que nous débarquons, les yeux remplis d’étoiles rien qu’à avoir vu une terre rouge surmontée d’un phare nous accueillir. Depuis toujours, je suis amoureuse des roches et de la terre ocre. Et François a une passion pour les phares, et encore plus la photographie de phares en pleine tempête (point bonus pour les vagues qui heurtent le bâtiment sur toute sa hauteur alors qu’un éclair déchire le ciel a l’arrière-plan). Bref, cela fait moins de trois minutes que nous sommes sur l’ile du Prince Édouard, et nous sommes déjà sous son charme.
Sur des routes grises divisées par une bande jaune et entourées de pins, nous nous enfonçons dans l’ile. Les routes sont presque désertes et semblent avoir été dessinées pour les amoureux de roadtrip.
Georgetown, un village, un phare et du sable
Notre première étape, Georgetown, est un tableau vivant. Des maisons de bois peint, comme je les aime, de grands espaces verts et le tout en bord de mer. Mais avant d’y arriver, nous décidons d’aller admirer le plus vieux phare en bois de l’ile, Panmure Island Lighthouse. Un joli phare que nous garderons surtout en mémoire comme étant la fois où « nous avons failli rester ensablé·es » ! Celleux qui suivent nos stories sur nos deux comptes Instagram (@Unsacsurledos et @Manoas_discoveries) connaissent déjà cette histoire. Une (més)aventure du genre de celle dont on ne rit qu’une fois terminée.
Nous avions le phare en vue. Une belle plage avait l’air de se profiler à gauche, cachée derrière une dune moelleuse de sable doré. Nous décidons de faire un arrêt photo. Alors que François entame le mouvement pour se mettre sur le bord de la route, je lui dis :
Tu ne penses pas qu’il vaut mieux éviter d’aller dans le sable ?
Trop tard, nous y sommes. Un ange passe (ou deux). François qui avait déjà coupé le moteur redémarre la voiture pour essayer de sortir. Les pneus tournent, la voiture, elle, reste immobile.
Bon, je vais sortir prendre des photos. On verra après pour la suite.
Manoa dort toujours paisiblement et je reste à ses côtés. Quelques minutes plus tard, François revient, réessaye, en marche avant puis en marche arrière, ressort, rentre à nouveau… sans aucun changement. Alors que le découragement nous gagne, une voiture s’arrête sur le bord de la route et deux femmes viennent à notre rencontre. Rapidement, François se met à vider le coffre de la voiture avec l’aide de nos deux volontaires. Nouvel essai, même résultat. François creuse davantage avec notre petite pelle, aplatit le sable près des pneus et réessaye… cette fois la voiture bouge, mais se rebloque rapidement. Une des deux femmes commence à appeler son assurance pour avoir l’aide d’une dépanneuse. François continue à creuser, sans grande conviction. Finalement, alors que tout espoir avait quitté notre petit groupe, la voiture avance suffisamment que pour retrouver la route. C’est gagné !
Encore sous le choc du cocktail d’émotions que nous venons de vivre, nous remplissons la voiture de son chargement et poursuivons notre route jusqu’au phare de la péninsule de Panmure Island. Un endroit calme et ressourçant… exactement ce qu’il nous fallait !
Nous arrivons à Georgetown sous le soleil… soleil qui a prévu de prendre des vacances pour les prochains jours. Manoa ayant besoin de se dégourdir les jambes, je reste avec lui à notre logement pour lui permettre de jouer et de nous balader dans le quartier. François, quant à lui, souhaite profiter de la météo idéale pour aller admirer un des plus beaux phares de l’ile et prendre des photos.
En fin de journée, j’aurai à lui raconter des rires, des parties de cachecache, une traversée de la chambre de notre petit bipède en pleine évolution, un repas de houmous de patate douce (une révélation !). Lui me parlera de plages de sable rouge et jaune, de lumières dorées, de phare et d’une famille de renard jouant sous les derniers rayons du soleil.
Greenwich, trail entre dunes et forêt
Levé·es tôt, une habitude acquise « grâce » à notre bébé, nous profitons d’un petit déjeuner à notre logement. L’Office de Tourisme y avait laissé à notre attention du fromage végane qu’il nous tardait de gouter. En toute honnêteté, c’est un des meilleurs que j’ai mangés de ma vie ! L’impression de déguster un cheese-cake aéré et fondant à la fois, fruité et complètement décomplexé ! Nous avons vidé le pot à nous deux (bon Manoa y a gouté aussi) en quelques minutes ! Notre espoir : trouver un des magasins qui vend le fromage de Freshstart Fauxmage, produit sur l’ile de Prince Édouard.
La journée s’annonce venteuse et, à partir de l’après-midi, pluvieuse. Nous décidons de profiter de la matinée pour aller randonner dans un des plus beaux parcs de la région : le Greenwich Beach National Park.
Trois sentiers sont proposés à l’entrée du site. Nous choisissons le plus long et celui qui promet d’être le plus beau : les dunes de Greenwich. Nos pas nous mènent sur un promontoire naturel offrant une magnifique vue sur une mer houleuse blanche et bleue, ainsi qu’une belle exposition aux vents déchainés ! Enfin protégé·es par les arbres, nous entendons à nouveau le gazouillis des oiseaux et trouvons le début de la promenade sur un sentier surélevé en bois.
J’adore ce genre de chemins. Je les trouve si beaux et si paisibles. Ils me permettent de garder le nez en l’air, à l’affut des animaux sauvages, sans craindre de me prendre les pieds dans une racine (je suis, littéralement, madame tête en l’air !). Et en plus ils permettent de découvrir la nature tout en la protégeant. Les plantes qui s’insèrent entre les grains de sable sont particulièrement fragiles et ont toutes les difficultés du monde à s’accrocher dans ce sol. Leur épargner d’être piétinées et de bouger leur surface d’accrochage par des pieds peu précautionneux est la première étape pour les préserver.
Le chemin tourne, zigzague doucement, comme une portée musicale ondulant au gré du chant des oiseaux. L’air est doux protégé par les pins. Et voilà l’horizon qui s’ouvre à nouveau. Devant nous, une petite mer intérieure. Le sentier surélevé de bois se convertit en chemin flottant sur l’eau. Le vent nous attend et nous fait la fête. Les cheveux s’envolent, les rires aussi. De la forêt à l’eau, nous arrivons aux dunes, dernier rempart avant la plage de sable fin où viennent rouler les vagues. La vue sur cette plage bordée par une dune aux airs de falaise est impressionnante… tout autant que le vent qui semble avoir ici la liberté d’exprimer son vrai potentiel.
Nous passons une grande partie du chemin de retour à chanter à tue-tête pour notre bébé que le vent semble impressionner… Qui sait où le vent a emporté nos mélodies (presque) harmonieuses ?
La journée s’achève sous la pluie à Charlottetown, dont nous ne verrons pas grand chose, malheureusement. Nous nous léchions déjà les babines à l’idée de manger dans l’un de leurs restaurants véganes (et de trouver le fauxmage !)… mais nous sommes dimanche et tout, absolument tout, est fermé. Ô rage, Ô désespoir. Pas de fromage.
Green Gables, la petite maison aux volets verts
Au programme de cette belle matinée : visiter Green Gables. C’était sur notre route. Ça avait l’air joli en photo… mais à part que cela était relié à la littérature d’une façon ou d’une autre, nous n’en connaissions rien. C’est donc sans attente particulière que nous nous rendons sur place… pour une belle surprise.
À peine la voiture stationnée, nous sentons que le lieu dégage une ambiance agréable. Le personnel, le côté nature… malgré les travaux en cours, pour préparer la haute saison, nous sentons déjà tout le potentiel de cette visite.
Nous commençons par découvrir une belle maison blanche et verte, puis suivons sagement le sens de la visite avec, en entrée, le visionnage d’une courte vidéo. En attendant notre tour, je lis, avec Manoa dans les bras, les panneaux explicatifs qui ornent la petite salle. Anne de Green Gables. Anne, la maison aux Pignons verts… Une petite fille rousse, adoptée par erreur par un couple de frères et sœurs qui désiraient un garçon pour les aider à la ferme… Plus je lis, plus j’ai une vague impression de déjà vu. Ce n’est qu’en lisant les panneaux que je me suis rendu compte que je connaissais déjà l’histoire de la petite Anne : j’ai visionné son adaptation en série sur Netflix quand j’étais enceinte !
Tout à coup, la visite prend une tout autre dimension. Je fais des liens, imagine la petite Anne évoluer dans le paysage qui m’entoure. La visite devient pour moi beaucoup plus vivante. Sentiment renforcé encore par la courte vidéo, qui transmet l’amour de l’auteure, Lucy Maud Montgomery, pour cette ile, la nature… et Anne.
Seconde étape : visiter la maison qui est le décor qui a inspiré l’auteure. Elle appartenait à des membres de sa famille, elle n’y a jamais vécu, mais s’y est rendue plusieurs fois et en a gardé une grande impression, particulièrement pour la nature environnante.
Nous pénétrons dans la maison qui a été aménagée dans le style de l’époque. Un voyage dans le temps agrémenté de petits cris de joie d’une petite fille visitant avec ses parents et le carnet spécial famille, où une liste d’objets sont à retrouver dans les différentes pièces de la maison.
Nous voilà à la dernière étape : se promener sur les sentiers qui entourent la maison. Au choix : sentier des amoureux ou bois hanté. Le long de la promenade, nous traversons un cours d’eau et sommes invité·es par les panneaux qui encadrent notre progression à observer la faune et la flore. Repérer les fleurs typiques de l’ile du Prince Édouard, les oiseaux et les écureuils. Manoa est tellement heureux au milieu des arbres. Il leur sourit comme s’il retrouvait en elleux un visage amical. Pendant de longues minutes, nous sommes resté·es assis·es sur la berge à observer l’eau s’écouler et scintiller au soleil, juste sous nos pieds. Je lui promets que quand il sera plus grand et qu’il fera plus chaud, il pourra aller tremper ses pieds dans les ruisseaux…
Cette visite nous a fait du bien. Ces liens à l’histoire, à la culture, à la nature et à la famille… tous mis en valeur en un même lieu, cela fait vraiment plaisir à voir. Sur la route en quittant Green Gables, nous voyons pulluler diverses activités familiales : minigolf, parc d’attractions, reconstitution du village de Green Gables (qui était fermé, car nous étions hors saison)…
Sur les routes, phares et rochers
Sur la route, après un rapide arrêt à French River, pour admirer la vue sur les maisons colorées en bord de rivière, nous arrivons au Cape Tryon, enfin presque ! Avant d’y parvenir, il nous faudra emprunter un sentier de terre rouge si « bumpy » que nous hésitons avant de nous y embarquer. Et François de répliquer :
Heureusement que nous avons un 4×4 !
Manoa endormi, gentiment bercé par le mouvement impulsé par le chemin cabossé, nous progressons lentement. La récompense au bout du chemin : le phare et, surtout, la vue sur les falaises de roche rouge.
Que j’aime les falaises, les roches et rochers. Et encore plus quand ils sont de couleurs chaudes, comme le canyon orangé de Petra (ah, Petra et son Siq !). Les oiseaux décrivent de grands cercles le long des parois rocheuses, faisant des allers-retours entre leur nid et l’océan. Le vent souffle, l’air marin emplit mes poumons et imprègne mes cheveux en bataille. Je me sens tellement petite et tellement vivante à la fois face à ces éléments de la nature.
L’arrêt suivant, c’est François qui l’a repéré. Séparé·es de la plage de sable blond par une dune, nous nous installons à l’arrière de notre voiture pour un piquenique, Manoa assis dans sa chaise à côté des caisses. Repus, notre bébé se laisse tenter par une petite sieste alors que son papa part en éclaireur, profiter du soleil et de la belle lumière pour prendre des photos.
Il revient rayonnant :
Il faut que tu voies ça !
Petit bébé blotti contre moi dans son porte-bébé, toujours endormi, je suis François sur un chemin de dune surplombant la plage. Nous descendons au milieu de rochers ocre, marchons quelques pas au rythme des vagues qui couvrent et découvrent le passage. Et enfin, je la vois.
Cette roche dressée au milieu du sable. Avec sa base plus fine que son sommet, elle fait penser à un arbre figé dans le temps. Tout bouge autour de lui, les marées qui viennent tremper ses racines, le vent qui vient se heurter à son tronc, les oiseaux qui se servent de sa cime comme d’un perchoir. Mais lui reste de marbre. Témoin immortel du pouls du monde.
Nous prenons quelques photos en famille, Manoa bien réveillé et tout aussi heureux que ses parents du spectacle qui s’offre à lui au sortir de sa sieste.
Ce lieu merveilleux était notre dernier arrêt sur l’ile du Prince Édouard… ou comment terminer en beauté !
L’ile du Prince Édouard, un bijou coloré
Je suis en manque de superlatif pour vous dire, plus encore que dans les lignes précédentes, l’amour que je porte à cette ile. C’est tellement beau, et malgré la petite taille de l’ile, les paysages sont variés et ont ce « je ne sais quoi » qui leur insuffle une impression de grandiose. Je comprends que l’auteure en soit tombée amoureuse et ait décidé d’en faire le lieu où narrer les aventures de son héroïne. Un coup de cœur complètement inattendu et sans appel : petite ile, on t’aime !
Dans le prochain épisode de notre aventure en voiture à travers les Amériques : toujours au Canada, avec le Nouveau-Brunswick.
En collaboration avec Destination Canada et l’Office de Tourisme de l’ile du Prince Édouard.
Coucou les baroudeurs !
Superbe récit et magnifiques photos, quel beau pays le Canada 😍
Je suis votre périple sur les stories Facebook, vous êtes déjà à Yellowstone, tout ce chemin parcouru, ça donne franchement envie de tout plaquer ! Canada et États Unis mes destinations de prédilection…
Pas trop fatigant pour bébé ? Et pour vous ? Votre itinéraire est défini ou vous roulez au gré du vent ?
Bonne continuation sur les routes !!! Take care. Bises à tous les 3
Bonjour Sandrine,
on est plutôt en mode gré du vent 😉